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8 janvier 2007 - Divers - Italie

Nel mezzo del cammin di nostra vita

Nel mezzo del cammin di nostra vita
mi ritrovai per una selva oscura
ché la diritta via era smarrita.
Au milieu du chemin de notre vie, je me suis retrouvé dans une forêt obscure. J'avais perdu la voie droite.

Ces trois vers sont les premiers de la Divine Comédie. Le milieu du chemin de la vie, c'est pour Dante l'âge de 35 ans. Né en 1265, il arrive pendant la semaine de Pâques de l'an 1300 dans un endroit inconnu. En trois jours il traverse l'enfer, monte dans le purgatoire et vole dans le Paradis où il rejoint sa bien-aimée. Cette épopée poétique, politique, philosophique et spirituelle débute par un égarement géographique et moral.

Ahi quanto a dir qual era è cosa dura
esta selva selvaggia e aspra e forte
che nel pensier rinova la paura!
Ah, c'est une dure tâche de décrire cette forêt sauvage et âpre et forte dont le souvenir ravive l'effroi !

Pour Philippe Sollers (La divine comédie, 2000), « mezzo veut dire quelque chose de beaucoup plus profond. Le milieu du chemin de la vie, de notre vie, c’est quelque chose qui peut être représenté comme permanent, et non pas se produisant à tel moment du temps. Ce milieu au sens fort du mot - mezzo -, c’est là où l’on peut toujours s’égarer, toujours, se perdre, toujours se tromper à nouveau, toujours recommencer la même histoire, toujours être surpris par l’enfer, toujours oublier ce qu’il faudrait atteindre : un autre état du corps lui-même. » Il parle bien, Sollers, et beaucoup.


Marc Devade, Nel mezzo, mai 1981, huile sur toile, 200x250 cm (article de A. Gauvin)

Un bulletin météorologique signé Aldo Meschiari décrit ainsi l'exceptionnel automne 2006 :

Nel mezzo del cammin di questo Autunno
Ci ritrovammo in una eccessiva calura
Che la invernal via era smarrita.
Ahi quanto a dir qual era è cosa dura
Esta calura anomala e strana e forte
Che del futur rinnova la paura!
Au milieu du chemin de cet automne, nous nous sommes retrouvés dans une chaleur excessive. Nous avions perdu la voie de l'hiver. Ah, c'est une dure tâche de décrire cette chaleur anormale et étrange et forte, qui du futur ravive l'effroi !

Le site Tramonto.org présente une association d'étudiants de Ferrare, dont l'activité principale semble être de boire de la bière et de manger des hamburgers. La description de chaque plat est remplacée par les premiers mots de la Divine Comédie. Le webmestre qui a réalisé ce site admirait Dante, mais il n'a semble-t-il pas eu le temps de terminer son travail. Les vers de Dante servent parfois en Italie à remplir les sites Web vides, comme le pseudo-latin Lorem ipsum.


Gino Calenda, Nel mezzo del cammin di nostra vita..., 2004

Les démographes Warren Sanderson et Sergei Scherbov, cités par Gabriele Battaglia, indiquent que l'allongement de la durée de vie correspond à un rajeunissement et non un vieillissement de la population. Au lieu de mesurer la vieillesse par le nombre d'années vécues, il mesurent la jeunesse par le nombre d'années qui reste à vivre. Et ce nombre augmente avec le temps. On vit plus vieux, mais on dispose de plus d'années de jeunesse. Ainsi l'âge moyen des Américains augmentera de deux années et demie entre 2000 à 2020, mais, malgré ce vieillissement de la population, il leur restera, en moyenne, plus longtemps à vivre jusqu'à la mort. Au fait, quel était l'âge moyen des Américains en 2000, sept cents ans après le voyage de Dante ? 35 ans, bien sûr...

J'ai eu 35 ans hier. La forêt n'est ni sauvage, ni âpre. Elle est incertaine. La vie n'est pas toujours un miracle, mais un apprentissage...

Publié par thbz le 08 janvier 2007

7 commentaire(s)

1. Par MyNight  (13 janvier 2007) :

On a pu lire moins sage...

En tout cas, un passage que j'aime beaucoup de chez l'ami Dante :
"- Maître, qu'entends-je ! et qui sont ceux qui vivent ainsi travaillés de douleurs ?
- Ce sont, me dit-il, les âmes qui vécurent sans vertus et vices : elles sont ici confondues avec cette légion qui garda jadis la neutralité entre les anges de Dieu et les esprits rebelles. Le ciel rejeta ces lâches enfants qui souillaient sa pureté et l'abîme leur refusa ses profondes retraites, de peur que les coupables ne se glorifiassent d'avoir de tels compagnons de leurs peines."

Ca ne manque pas ça non plus de sagesse pour quand on est au milieu du guet ;-)

2. Par Jean  (31 janvier 2007) :

Avec retard, bon anniversaire.
dante me fait penser immanquablement à Beatrice. Nel Mezzo peut-il se rapporter au "démon de midi" ?

3. Par S.  (02 février 2007) :

Bon anniversaire :-)
Pour moi, la vie est un long tonnel qu'on emprunte et d'ou on ne sort jamais, un apprentissage oui mais aussi une travérsée...

Tu viens d'avoir 35ans, moi c'est plus trop loin mais dans cette travérsée qui est la Vie, qu'est-ce que tout ça signifie?

4. Par S.  (29 juillet 2007) :

Ca y est mon tour est aujourd'hui, une relecture de ton billet s'impose, plus je m'avance dans cette travérsée plus la réflexion prend une place importante...

5. Par thbz  (29 juillet 2007) :

Bon anniversaire ! Ne t'inquiète pas, 35 ans c'est le bel âge...

6. Par Leila Zhour  (03 septembre 2007) :

je lis ceci bien après l'anniversaire fatidique et, si Sollers a une approche intéressante des choses, cela me rappelle inévitablement la "voie du milieu" chère à Siddharta.
Oui on est toujours sur le point de s'égarer car toujours on tend vers les extrêmes, et ce n'est qu'en zigzagant qu'on trouve la via del mezzo...
Ca me fait penser également aux doryphores dont certaines variétés très petites (de l'ordre d'un milimètre), sont pourvues d'ailes mais pas d'yeux. Ils se rapprochent donc de leur nourriture à l'odorat, volant dans une direction d'après leur nez puis virant dès que l'odeur disparait pour la retrouver à nouveau et parvenir à leur but. c'est un peu comme s'ils tiraient des bords, comme à bord d'un voilier qui remonte au vent.
Pour eux aussi, la ligne droite est leur milieu, mais ils serpentent de part et d'autre de ce milieu et s'égarant sans voir la beauté dangereuse et fragile de l'équilibre parfait entre trop et trop peu, entre bien et mal, pour revenir à Dante ou à Sollers...
Nous sommes de pauvres doryphores pourvus d'yeux, de pattes et même de cerveaux, mais non d'ailes. Ca, seul les anges, et peut-être Béatrice, en ont!!
LZ

7. Par Leila Zhour  (03 septembre 2007) :

j'avais fait une erreur de copier coller dans le champ URL !!
oups...

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