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27 janvier 2008 - Cinéma

Mariages organisés dans des royaumes de fantaisie


Maurice Chevalier tente d'égayer la veuve Jeannette MacDonald.

« Un banquier américain en voyage dans les Balkans devient l'ami d'un prince et entreprend de lui trouver une épouse. » Tel serait l'argument de Prince sans amour, de Howard Hawks, selon le site de la Cinémathèque qui projetait le film ce soir. C'est tout simplement faux, l'histoire n'est pas celle-là. Je le sais : j'y étais. Prince sans amour, c'est à peu près, sans les chansons et même sans les paroles, la même histoire que La Veuve joyeuse. Je le sais : j'ai revu il y a quelques semaines la version que Lubitsch a donnée de l'opérette.

Dans les deux cas un micro-royaume comme Hollywood aime les imaginer, pittoresque et décadent, oublié par la modernisation, survit à une extrémité de l'Europe. Dans les deux cas l'État est en faillite et seul un mariage pourrait rétablir sa situation. Pour cela on ne peut éviter un voyage à Paris, capitale mondiale de la séduction. Les deux jeunes gens que la conspiration destine l'un à l'autre se rencontrent d'abord par hasard et sans se reconnaître. Ils tombent amoureux sans imaginer que l'un d'eux est payé pour séduire l'autre. Paid for Love, c'est le titre du film de Hawks. Bien évidemment, l'amour triomphera à la fin.


Virginia Valli, grâce à qui le Prince ne reste pas longtemps sans amour.

La différence entre les deux films n'est donc pas dans les clichés, qui se suivent et se ressemblent. Elle est dans l'humour de Hawks et dans l'humour de Lubitsch, aussi opposés l'un à l'autre qu'une chaise Art déco et un fauteuil Louis XV. Le fauteuil Louis XV, ça serait Lubitsch : légèreté et élégance, mais aussi grivoiserie allusive. Il n'a pas peur d'introduire un peu de mélo et beaucoup de satire, mais sans commettre l'impolitesse d'être trop sérieux. La chaise Art déco, ça serait Hawks : une vision stricte et cinglante des hommes, sans illusion. Lorsqu'il s'agit de sexe, l'humour n'est pas simplement grivois mais carrément licencieux : tandis que la jeune femme se déshabille dans sa chambre, le cousin du prince, qu'elle n'a pas vu, l'observe tranquillement en dévorant avec délectation une banane.

Autant il est facile de trouver des mots pour décrire les films de Lubitsch (par exemple : toujours extraire de la vie ce qui allège et non ce qui alourdit), autant le classicisme et la diversité du cinéma de Hawks rendent son « style » plus difficile à identifier : sa capacité à se mouler dans tous les genres cinématographiques lui permet de glisser hors de toutes les catégorisations.

Publié par thbz le 27 janvier 2008

3 commentaire(s)

1. Par S.  (29 janvier 2008) :

Ce qui me plaît dans ton article c'est ton humour de comparer les films et les fauteuils!! Tout est artistique tu vas me dire mais c'est marrant, original loin des critiques très austères et sérieuses de certains...

2. Par KA  (29 janvier 2008) :

Je me demande vraiment ce qui a présidé à la naissance de ce billet. Je cherche, je cherche, et je ne trouve pas…
Et c'est bizarre, un autre blogue traite peu ou prou du même sujet. C'est par là :
http://actualites34.blog.lemonde.fr/2008/01/27/jeu/

3. Par thbz  (29 janvier 2008) :

Un film passe à la Cinémathèque alors j'en parle pour montrer que je vais à la Cinémathèque (ceux qui passent au Gaumont Aquaboulevard, j'évite parce que je fais un blog cultivé). Et puis, la photo de Virginia Valli, ça n'est pas une raison suffisante ?

À mon tour je cherche le rapport avec Le Jour se lève, mais je ne trouve pas... à part que tous ces films ne sont pas suédois et n'ont pas été réalisés par les Monty Python.

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