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19 novembre 2010 - Cinéma

En présence d'un clown (1997, Ingmar Bergman)

En présence d'un clown (1997), d'Ingmar Bergman, raconte une histoire étrange sur un rythme déconcertant : une longue séquence dans un hôpital psychiatrique laisse la place, après une grande ellipse, à une séquence encore plus longue dans un cinéma où les mêmes personnages projettent un film qu'ils ont réalisé et qui doit être le premier film « parlant ». Interrompue par un incident technique, la projection laisse la place, elle, à une représentation théâtrale.

Alors que le film baigne au début dans l'intemporalité d'une chambre d'hôpital, l'évocation des techniques cinématographiques et surtout la coiffure à la Louise Brooks de la fiancée de l'inventeur l'ancrent peu à peu dans les années 1920.

Le rythme des scènes déconcerte également car le cours de l'histoire ne se met en place que lentement, interrompu par de longues confessions du fou ou par la scène onirique et érotique de la rencontre avec le clown dans l'hôpital.

En présence d'un clown reprend des thèmes courants de Bergman : la folie, le couple qui se défait, le clown, la troupe théâtrale. Mais rarement il aborde aussi frontalement la question du cinéma : il parle plutôt, habituellement, de cirque ou de théâtre.

La mise en scène s'écarte également des autres films par un caractère évidemment théâtral : deux décors seulement, aucun extérieur, un nombre limité de personnages. Non seulement le film est l'adaptation d'une pièce de théâtre, mais la mise en scène, d'ailleurs splendide, ne cherche en rien à s'abstraire de cette origine.

Or l'histoire elle-même semble donne au théâtre la primauté sur le cinéma. Le fou invente des techniques cinématographiques refusées par l'Office des brevets parce que d'autres ont eu l'idée avant lui. Il imagine enfin un « cinéma parlant » consistant simplement, pour les acteurs, à prononcer les paroles derrière l'écran pendant la projection. Mais la salle ne dispose pas d'une puissance électrique suffisante pour une projection de film : l'installation électrique prend feu. Une fois l'incendie est circonscrit, les acteurs reprennent leur histoire en jouant le film devant le public.

Alors que le film projeté était, de toute évidence, particulièrement mauvais, la représentation théâtrale, dans un décor improvisé, retrouve la magie du spectacle et de l'incarnation des acteurs dans des personnages.

Bref, dans tous les secteurs du film, c'est le théâtre qui l'emporte. Or En présence d'un clown n'est qu'une parenthèse cinématographique dans une période de la vie de Bergman, entre 1986 et 2000, consacrée toujours très activement au théâtre.

Il ne s'agit donc pas un film facile ; dans la relation entre le spectateur et le film, c'est au spectateur à faire une bonne partie du chemin. Et le film est d'autant plus difficile que, malgré certains thèmes communs, il ne ressemble guère aux grands classiques de Bergman des années 1950 ou 1960. On ne retrouvera donc guère ses repères.

Publié par thbz le 19 novembre 2010

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