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17 avril 2015 - CoréeUn an après le naufrage du Sewol
C'était hier le premier anniversaire du naufrage du Sewol, qui a causé la mort de 300 personnes dont une grande majorité de lycéens en voyage scolaire, ainsi qu'un suicide.
Plusieurs manifestations étaient organisées. Les autorités nationales étaient absentes. Alors que le 11-Septembre aux États-Unis ou l'attentat contre Charlie Hebdo en France ont entraîné un (plus ou moins bref et illusoire) sentiment d'unité nationale sous l'égide des autorités, le naufrage du Sewol et sa gestion contestée ont entraîné une fracture de la société. D'un côté les familles des enfants victimes, qui réclament une enquête complète et indépendante, de l'autre le gouvernement qui cherche à passer à autre chose. Comme lors de l'affaire Dreyfus en France, chacun se place d'un côté ou de l'autre.
Du coup cela fait un an que des tentes jaunes, couleur devenue symbole de la catastrophe, occupent Gwanghwamun, esplanade située devant le palais impérial, emplacement aussi central et symbolique à Séoul que la place Tian-an-Mien à Pékin. Au cours des mois, s'y sont succédé slogans, manifestations, pétitions, mémorials improvisés et grèves de la faim. Le pape lui-même s'y est arrêté.
Hier soir, la principale réunion avait lieu devant la mairie de Séoul, à quelques centaines de mètres de Gwanghwamun :
On prête moins attention aux autres manifestations présentes en permanence devant la mairie, concernant tel ou tel projet de la municipalité. En Corée, presque chaque bâtiment public ou siège de grande entreprises a ses protestataires installés en permanence devant sa porte.
Quelques dizaines de milliers de personnes étaient réunies après le coucher du soleil. Beaucoup portaient une fleur blanche. Sur une scène, quelques chanteurs viennent exprimer leur soutien, le père d'une victime vient prononcer un discours d'une grande vigueur contre l'attitude du gouvernement et de la présidente. Des films commémoratifs sont projetés sur un grand écran. Les paroles sont sous-titrées et les discours en direct font l'objet d'une traduction simultanée en langue des signes.
Pendant ce temps, à Gwanghwamun, malgré un froid vif très inhabituel en cette mi-avril, des milliers de personnes font la queue en bon ordre sur l'esplanade, faisant plusieurs allers-retours à petits pas entre deux monuments qui semblent commémorer les qualités qui ont manqué dans l'affaire du Sewol : la grosse statue assez moche du roi Sejong, modèle de bonne administration, et la figure plus élégante de l'amiral Yi Sun-shin, inventeur de bateaux légers et très manœuvrables.
Ces personnes viennent rendre hommage aux victimes. Après une heure et demie d'attente au moins, elles seront admises, par groupes de six ou sept, à se place devant une sorte d'autel dressé au milieu de l'esplanade :
À quelques dizaines de mètres, un autre homme poursuit son propre combat. Il recueille des signatures pour demander l'érection de statues aux « pères fondateurs » Syngman Rhee et Park Chung-hee, anciens dictateurs coréens, avec un slogan très clair : « Il faut tuer les Rouges ! »
Pendant ce temps, la police se met en place. Comme toujours en Corée, les policies se déplacent et stationnent en groupes très compacts. Un peu plus tard, on apprendra que la grande avenue qui borde l'esplanade de Gwanghwamun a été bloquée par la police, de crainte que les manifestants de la place de Séoul ne décident de marcher en direction du palais impérial, voire du palais présidentiel situé derrière. Le risque paraît pourtant minime, ce dernier étant particulièrement protégé.
Et de toute manière, la présidente n'est pas dans son palais : pendant que le pays commémore une de ses catastrophes les plus traumatisantes, elle vient de prendre l'avion pour un voyage à l'étranger.
Publié par thbz le 17 avril 2015
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