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27 octobre 2010 - 13e arrondissement

La rue Watt

La rue Watt se glisse sous les voies ferrées du 13e arrondissement. C'est la première rue de Paris lorsqu'on entre dans la capitale par l'est. (Le périphérique et les Maréchaux, constructions aériennes, ne comptent pas.)

La rue Watt est connue par un poème de Boris Vian :


(...)
Une rue bordée d'colonnes
Où y a jamais personne
Y a simplement en l'air
Des voies de chemin d'fer
Où passent des lanternes
Tenues par des gens courts
Qu' ont les talons qui sonnent
Sur ces allées grillées
Sur ces colonnes de fonte
Qui viennent du Parthénon
On l'appelle la rue Watt
Parce que c'est la plus bath
La rue Watt
(...)

Autrefois, la rue Watt était connue également pour ses graffitis. Je les ai vus. Je n'en ai pas conservé de traces. Ceci, c'est déjà après son nettoyage, avant sa rénovation, pendant le tremblement de terre de l'opération Paris Rive Gauche qui depuis quinze ans retourne le sol et transforme année après année le paysage de cette partie de Paris.

Aujourd'hui, la rue Watt existe toujours. Côté ville, le théâtre du Lierre, qui marquait l'entrée de la rue, est en voie de destruction.

Côté Seine, Paris Rive Gauche construit des immeubles variés, un peu massifs, pas très gais, utiles, neufs, en un mot : architecturaux. Les plus beaux ne sont pas implantés le long de la rue Watt.

Entre les deux, le cœur de la rue Watt continue de battre sous les voies ferrées. Elle a reçu un « mobilier urbain » de bon goût et un éclairage design qui met bien en valeur des murs de pierre immaculés.

La rue Watt conserve pourtant son mystère pour qui veut bien le voir. Ainsi, pourquoi les gouttières donnent-elles directement sur les trottoirs ?

La rue est peu fréquentée.

Les quelques piétons qui passent sous les voies habitent, on l'imagine, les HLM de l'est du 13e et vont travailler comme agents d'entretien ou de sécurité dans les immeubles flambant neuf de Paris Rive Gauche.

Les employés et les ingénieurs, eux, viennent par le bus ou le métro automatique, qui les déposent directement sur l'avenue de France qui passe au-dessus de la rue Watt.

Il y a donc ceux du dessus, qui arrivent par les transports en communs, voient le soleil et les immeubles de verre ; et ceux du dessous, qui marchent dans l'obscurité au fond des entrailles du nouveau quartier.

Et le jour où la Seine, comme en 1910, jaillira hors de son lit, tandis que l'avenue de France surplombera les flots qui s'étendront de part et d'autre, c'est la rue Watt, première rue de Paris, très basse, qui sera la première submergée.

Mise à jour (janvier 2011) : la veille du jour où je publiais cet article, un autre amateur du 13e arrondissement, qui partage aussi mon prénom, proposait son propre parcours de la rue Watt...

Publié par thbz le 27 octobre 2010

7 commentaire(s)

1. Par Détails  (01 novembre 2010) :

Pour ceux qui ne connaissent pas cette rue, le changement est bienvenu mais pour les nostalgiques de l'époque ça devrait l'être encore moins non?

2. Par Tilia  (03 novembre 2010) :

un bel éclairage pour la rue Watt, c'est la moindre des choses, non ? ;-)

3. Par thbz  (03 novembre 2010) :

Certes, merci pour cette remarque lumineuse :-)

4. Par FAE  (25 décembre 2010) :

Il y avait rue Watt un atelier où l'on pouvait réparer sa voiture soi-même, avec tout le matériel fourni et l'aide d'un technicien. C'est ainsi que j'ai intégralement démonté et remonté le moteur d'une 2 CV qui n'avait pas supporté un trajet trop violent sur l'autoroute. Le moment magique, c'est quand on a lancé la voiture sur la pente légère de la rue et qu'elle a pris son envol...

5. Par go  (07 février 2011) :

Quel massacre que cette opération paris rive gauche !
Après des mois de travaux, la rue Watt s'est définitivement retrouvé enfouie sous des tonnes de béton, la lumière ne passera plus comme avant et le bruit des rames ne chanteront plus au dessus de nos têtes.
Merci à nos chers politiques pour avoir massacrer notre arrondissement, qui chaque jour, perd un peu plus de son âme.

6. Par thbz  (07 février 2011) :

@Go : je crains de ne pas être d'accord. La rue Watt est différente, elle me plaît toujours, c'est un endroit étrange où une vie un peu sauvage, justement, se mêle au high tech des éclairages planifiés.

Je me suis promené dimanche à Paris-Rive Gauche ; c'est un endroit magnifique, architecturalement très intéressant, où il est passionnant de voir se construire, lentement depuis 15 ans, un nouveau morceau de ville et une nouvelle vie.

Le vieux 13e avait son Léo Malet, mais le 13e nouveau peut aussi trouver ses narrateurs (voir « Cœurs » d'Alain Resnais).

7. Par Pierre  (31 août 2011) :

De ma banlieue ouest, il n'est pas évident d'aller traîner ses guêtres du côté de cette rue, encore que je sois déjà allé rue du Loiret.

Et je ne l'ai pas fait spontanément. Il a fallu une photo des éclairages installés sous les voies pour que j'y vienne, appareil dans les mains.

Pas gai le parcours, mais attachant, et plus désert encore que la rue Proudhon dans le 12ème.
Bref, j'ai bien aimé votre reportage sur ce recoin du 13ème.

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