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12 février 2008 - Corée

Namdaemun, ou la technologie oubliée

Les Coréens sont des experts en construction. Ils ont couvert leur pays de barres et de tours. Ils construisent en ce moment à Dubai le plus grand immeuble de tous les temps (Burj Dubai, Samsung Engineering & Construction) :

L'incendie de la porte de Namdaemun, à Séoul, montre pourtant que le progrès ne va pas à sens unique. On acquiert des technologies, mais il arrive aussi qu'on en perde. D'après ce qu'on peut lire sur les sites d'information coréens (merci à ma traductrice), cette porte aurait brûlé parce qu'on ne savait plus vraiment comment elle était construite. Parce qu'on avait oublié comment il fallait lutter contre un incendie dans ce type d'architecture.

Explications.

D'abord, il y a deux cents ans des soldats auraient sûrement monté la garde devant cette porte d'entrée de Séoul. Ils n'auraient pas permis à M. Chae de venir allumer un feu sous la charpente du bâtiment. M. Chae, 69 ans, était très en colère contre l'État ; il lui reprochait de l'avoir spolié dans une affaire d'expropriation. Avant-hier soir, il n'a trouvé sur son chemin que des caméras de surveillance. M. Chae est aujourd'hui en prison : maigre consolation.

Ensuite et surtout, les pompiers, arrivés sur place six minutes après avoir été alertés, n'ont pas su ce qu'il fallait faire pour arrêter un incendie dans un bâtiment aussi étrange : pensez-donc, une charpente en bois ! On ne voit plus ça que dans les sites touristiques...

Ils ont commencé par arroser le bâtiment. Puis ils sont entrés et n'ont vu à l'intérieur qu'une fumée jaune, sans doute causée par l'arrosage. Le feu semblait maîtrisé.

Or, comme dans La Tour infernale, les flammes couvaient là où personne ne les attendait : entre le toit et une couche de terre installée entre deux couches de la charpente. Une vieille technique de construction qui servait à imperméabiliser les toitures. On ne fait plus comme cela, aujourd'hui.

Certains ont tout de même soupçonné qu'il se passait quelque chose dans cette partie du bâtiment. Ils ont recommandé de détruire une partie du toit afin d'accéder à cette zone, mais les autorités s'y sont paraît-il opposées afin de ne pas porter atteinte à ce trésor national. Ainsi, le feu que l'on croyait presque éteint a progressé sans qu'on s'en rende vraiment compte. Et lorsque les pompiers ont vraiment compris ce qui se passait,c'était trop tard.

Il y a deux cents ans, le trésor national n° 1 de la Corée n'aurait peut-être pas disparu en l'espace de six heures, devant trois cents pompiers impuissants.

Cela pourrait-il arriver en France ? Probablement. On s'est rendu compte il y a quelques années que de nombreux sites, à commencer par les réserves du Louvre, étaient en terrain inondable. Les techniques de construction évoluent, nul doute que nous avons, nous aussi, oublié certaines règles de base de l'architecture d'autrefois.

Le graphique suivant (vu sur le site Chosun.com) montre la structure interne du bâtiment et l'emplacement des flammes :

Publié par thbz le 12 février 2008

2 commentaire(s)

1. Par KA  (21 février 2008) :

Ralala !
Quand je suis allé à Séoul, ce monument n'était pas visitable. Et maintenant, il a cramé.
(On peut se demander, entre parenthèses, ce que donnerait un incendie dans le marché de Namdaemun… Enfin non, on ne se pose même pas la question.)

Cela dit, comme il est mentionné dans les comm' du post précédent, gageons que les Coréens sauront reconstruire ce lieu.
Dans les années 50, le Pavillon d'Or de Kyoto (le Kinkakuji) avait entièrement brûlé, et les Japonais l'ont reconstruit à l'identique. C'était ya longtemps, il est vrai.
(Cet incendie a été raconté dans "le Pavilln d'Or" de Mishima Yukio.)

2. Par thbz  (25 février 2008) :

Un incendie dans le marché de Namdaemun (hors des horaires d'ouverture, pour ne pas faire dans la tragédie), ça réduirait le nombre de sacs Louis Vuitton dans les rues de Séoul pendant quelque temps...

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