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13 novembre 2010 - Arts, architecture...Roaratorio - Merce Cunningham
Roaratorio est un spectacle de Merce Cunningham du début des années 1980, réalisé sur une musique de John Cage elle-même inspirée de Finnegans Wake. Il est repris ces jours-ci au théâtre de la Ville, dans le cadre d'une sorte de rétrospective de l'œuvre du chorégraphe disparu l'an dernier.
Treize danseurs habillés de collants surmontés de bas de différentes couleurs occupent la scène pendant une heure trente. C'est de la danse pure et intense, non troublée par les décors. Parfois seuls, parfois par couples, à trois, ou tous ensemble. Les figures sont variées mais toujours énergiques. La musique mélange et superpose des airs irlandais, des cris, des bruits de toutes sortes ; la chorégraphie s'inspire en conséquence, dans un renouvellement constant et haletant, des danses traditionnelles comme des pas de danse classique et de l'exploration des possibilités du corps et de l'espace qui caractérise la danse contemporaine. L'élément unifiant, c'est peut-être les jambes qui sont constamment mises à l'épreuve.
Les danseurs manifestent un engagement total, entièrement offert au spectateur : avant le spectacle, l'échauffement ayant lieu sur scène sans rideau — pendant le spectacle, car les danseurs se reposent, se désaltèrent, massent leurs jambes et changent de vêtements sur les bords de la scène et non en coulisses — après le spectacle même où ils s'attardent encore un peu avant de quitter véritablement la scène.
(Les danseurs, à la différence des acteurs d'un film, sont toujours anonymes au début d'un spectacle ; ils acquièrent ensuite une certaine individualité qui les rapproche plus des modèles de Bresson que des acteurs de cinéma ; je finis par leur donner des surnoms, fondés non sur leurs styles de danse qui sont interchangeables mais simplement sur leur apparence physique : d'un numéro à l'autre je reconnais ainsi le caïd, le frère du caïd, le gentil garçon, l'homme de Chypre, Denis, le blond dégarni, la Romaine, la Munichoise, Maria Callas, la femme d'Alger, la femme de trente ans, l'actrice hollywoodienne et Cheveux-courts.)
À cet engagement total, à cette bonne volonté permanente, à l'occupation permanente de l'espace scénique par une danse sans artifice, le public à répondu ce soir par des applaudissements longs et unanimes, rappelant cinq, six fois des danseurs enfin souriants.
Publié par thbz le 13 novembre 2010
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