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mai 08, 2007

08 mai 2007 - Arts, architecture... - Paris - (lien permanent)

Le squelette de Jussieu

S. me fait remarquer qu'il y a beaucoup de squelettes sur ce bloc-notes. Ici un squelette humain, celui d'une sorte d'androïde. Ce n'est pas que j'aie un goût particulier pour les squelettes. Il se trouve simplement que j'en croise de temps en temps...

Voici le plus grand de tous : 85 mètres au garrot. C'est le squelette d'une tour :

La tour centrale de la faculté de Jussieu est en cours de rénovation. Après les opérations de désamiantage, elle a été complètement écorchée : façade arrachée, murs intérieurs démantelés. La fontaine de la place Jussieu en saigne encore :

Seuls demeurent les plateaux et le noyau central. La tour devrait recevoir une nouvelle façade au cours de l'année.

Publié par thbz (mai 08, 2007) | Commentaires (10)


mai 06, 2007

06 mai 2007 - Arts, architecture... - (lien permanent)

Une cantate de Bach

Le sujet de cet article est une cantate de Bach. Le Temple du Foyer de l'Âme, près de la Bastille, a entamé une intégrale des cantates de Bach il y a quelques années, à raison d'une cantate le premier dimanche de chaque mois. Aujourd'hui, c'était la cantate « Derr Herr denket an uns », BWV 196.

(Il est 19h, j'ai donc une heure pour terminer cet article avant l'annonce officielle des résultats de l'élection présidentielle.)

Le Temple du Foyer de l'Âme est une cuvette très bien éclairée par un plafond vitré. Il n'encourage ni au recueillement gothique, ni à l'exaltation baroque. Il propose juste une communauté en apparence ouverte et fraternelle, avec une grande chaire bien exposée sur le mur du fond.

(France-Info, faute de pouvoir parler d'autre chose, donne les taux de participation, qui semblent encore plus élevés qu'au premier tour. Je ne suis pas allé voir les sites étrangers pour obtenir les estimations de résultats avant l'heure française légale. J'ai toutefois entendu des passants évoquer un chiffre, que je ne peux pas donner pour l'instant.)

Avant la cantate, le concert s'ouvre avec le choral « Erbarm dich mein, O Herr Gott », BWV 721. L'orchestre compte six instruments en plus de l'orgue, ainsi que quatre chanteurs. Seul l'orgue joue pendant le choral.

La cantate est courte. Elle commence par une sinfonia, morceau orchestral.

Chœur. Le deuxième mouvement fait intervenir les quatre chanteurs. À gauche, un brun habillé de blanc pour la partie de basse. À sa droite, un jeune homme blond qui accompagne de son corps les mouvements de sa voix de ténor. Puis un homme dont la corpulence imposante contraste avec une voix d'alto aérienne. Juste à côté de lui, une femme toute menue : pas plus d'un mètre quarante à l'encolure, mais elle domine l'assistance par une pose et un maintien dignes d'une diva.

(19h 30. Je n'ai pas pu m'empêcher d'aller voir sur le site de Romandie News. Leur estimation confirme celle que j'ai entendue dans la rue. Ils citent des chiffres donnés « par le ministère de l'Intérieur ». Pendant ce temps, France Inter continue à égrener des taux de participation, tout en essayant d'attiser le suspens : les chiffres donnés sur Internet, dit le journaliste, pourraient être remis en cause « surtout si les écarts étaient plus faibles que prévu ».)

Air. C'est un solo interprété par la soprano. Sa voix « fragile » évoque, selon le programme imprimé, la crainte de l'Éternel. C'est une jeune femme japonaise. Parfaitement à l'aise, elle regarde devant elle avec calme. « Er segnet, die den Herrn fürchten,/ beide, Kleine und Größe. » (« Il bénira ceux qui craignent l'Éternel / Tant les petits que les grands. »)

Une cantate, c'est une série de morceaux variés : instruments, orgue, chanteurs seuls ou en groupe. Si le sujet est toujours religieux et méditatif, la musique est colorée et jamais ennuyeuse. Au Temple du Foyer de l'Âme, les musiciens sont toujours jeunes et pleins d'entrain.

(Le site de la Tribune de Genève confirme les chiffres de Romandie News. Il indique que les partisans du candidat indiqué par ces estimations ont déjà commencé à se réjouir. Pendant ce temps, France Info rappelle les taux de participation.)

Duo. La basse et le ténor dialoguent. « Derr Herr segne euch je mehr und mehr,/ euch une eure Kinder. » (« L'Éternel vous bénira encore et encore,/ Vous et vos enfants. »)

Choral. Tous les chanteurs se réunissent pour un unisson qui se transforme en fugue. « Ihr seid die Gesegnten des Herrn, der Himmel und Erde gemacht hat. Amen. » (« Vous êtes bénis de l'Éternel, qui a fait les cieux et la terre. Amen. »)

(19h 40. France Info ne donne toujours pas les résultats, mais montre l'ambiance au siège des deux candidats : très animée dans les deux cas selon le journaliste. Pourtant, derrière les envoyés spéciaux, l'atmosphère semble beaucoup plus calme chez Ségolène Royal que chez Nicolas Sarkozy.)

La cantate est terminée. Une « Fantaisie en sol majeur », BWV 572, clôt le concert. Fantaisie un peu triste : l'orgue n'a pas une sonorité aussi belle que celui de l'église des Billettes.

Les spectateurs sortent peu à peu. Ce temple a été fondé par le pasteur Wagner, un prédicateur à succès au début du XXe siècle. Une exposition montre une lettre par laquelle le président Theodore Roosevelt l'invite à venir faire une tournée aux États-Unis. Des articles de journaux américains rendent compte des hautes capacités oratoires du pasteur français.

Sur la place de la Bastille, le soir commence à tomber. Les équipes de télévision se préparent.

Des cas de police se sont installés depuis longtemps dans les boulevards environnants. Les policiers discutent entre eux, fument une cigarette, attendent.

Pendant ce temps, un groupe d'acteurs-danseurs fait son spectacle devant l'Opéra. Leur dynamisme et leur humour réjouissent les passants.

(19h 58. France Info attend toujours. Jusqu'à la dernière minute ils auront réussi à parler sans donner les chiffres des estimations.)

Et au moment où on descend dans le métro, on entend quelques mots échangés par des passants qui passent sur des patins à roulettes : « Sarkozy à 54% ».

(20h. France Info l'annonce : « le nouveau Président de la République est Nicolas Sarkozy. » Quelques cris dans la rue.)

Cet article est terminé.

Publié par thbz (mai 06, 2007) | Commentaires (3)


06 mai 2007 - Divers - (lien permanent)

L'homme et la terre

L'espace vu par la géométrie / vu par la géographie (p. 2) :

L'espace géométrique est homogène, uniforme, neutre. Plaine ou montagne, océan ou sylve équatoriale, l'espace géographique est fait d'espaces différenciés. Le relief, le ciel, la flore, la main de l'homme donnent à chaque lieu une singularité d'aspect. L'espace géographique est unique ; il a un nom propre : Paris, Champagne, Sahara, Méditerranée.

On appelle ça, paraît-il, de la géographie phénoménologique. C'est un livre d'Eric Dardel : L'homme et la terre, publié en 1952.

(C'est à peu près le seul ouvrage d'Eric Dardel, professeur d'histoire-géo et géographe spécialisé dans les questions relatives à la pêche. Ce livre n'a trouvé des lecteurs qu'après la mort de l'auteur, dans les années 1970.)

La géographie introduit un regard humain sur l'espace (p. 35) :

On peut dire que l'espace concret de la géographie nous délivre de l'espace, de l'espace infini, inhumain, du géomètre ou de l'astronome. Il nous installe dans un espace à notre dimension, dans un espace qui se donne et répond, espace généreux et vivant ouvert devant nous.

Mais un seul regard ne peut suffire à embrasser la complexité du monde :

L'avion, dit Saint-Exupéry, « nous a fait découvrir le vrai visage de la Terre ». Alors que les routes évitent les régions stériles, les rocs et les sables, alors que cette terre où les chemins « inclinent vers les abreuvoirs et les étables », nous « l'avions crue humide et tendre », « du haut de nos trajectoires rectilignes, nous découvrons le soubassement essentiel, l'assise de rocs, de sable et de sel où la vie quelquefois, comme un peu de mousse au creux des ruines, ici et là se hasarde à fleurir » (Terre des hommes, p.62).

Mieux, le même lieu vu depuis le même endroit prendra deux significations différentes pour deux personnes différentes (p.47) :

C'est par son habitat, par l'aménagement de ses champs, de ses vignes, de ses prairies, par son genre de vie, par la circulation des choses et des personnes que l'homme extériorise sa relation fondamentale avec la Terre. (...) Un même pays est autre pour le nomade, autre pour le sédentaire.

L'homme est donc toujours présent dans la géographie, parce qu'elle dépend du regard que porte l'homme sur le monde. Et aussi parce que l'homme n'est pas seulement un témoin, il modifie lui-même l'espace sur lequel il pointe ensuite son regard et sa sensibilité géographiques (p. 40) :

L'homme s'est fait aussi constructeur d'espaces, en ouvrant des voies de communication : sentiers, pistes, routes, voies ferrées, canaux sont autant de manières de modifier l'espace, de le recréer. La route défait l'espace pour le refaire, le regrouper. (...) Dans la campagne qu'elle traverse et qui, par contraste, semble plus immobile, plus calme, elle agit comme un appel au mouvement, comme une fuite vers l'horizon et au delà de l'horizon ; elle ouvre l'horizon et dynamise le paysage.

Écrivant en 1952, Eric Dardel a connu la guerre qui, au-delà de toute mesure humaine, a touché la Terre entière. Il vit à l'époque où l'homme découvre avec stupeur qu'il peut menacer les équilibres écologiques. Il ne s'agit pas encore de la couche d'ozone des années 80 ni de l'effet de serre des années 2000 (p.127) :

Si même nous oublions l'usage parfois inquiétant que fait aujourd'hui l'homme de sa souveraineté absolue sur le plan général, en renforçant sans cesse « très objectivement » son pouvoir de destruction, en détruisant « scientifiquement » des vies humaines par la guerre ou le camp de concentration, des faits incontestables allégués sur le terrain de la géographie suffiraient à nous inciter à plus de prudence et de modestie quand nous exaltons notre vision purement objective du monde. (...) Il y aurait beaucoup à dire sur la manière dont l'homme dispose de la Terre en maître absolu, provoquant ici l'érosion des sols, là un régime de carences alimentaires proches de la famine.

Trois pages avant la fin du livre, il nous donne les clés du titre du dernier film de Nuri Bilge Ceylan :

La géographie présuppose et consacre une liberté. L'existence, en choisissant sa géographie, exprime souvent le plus profond d'elle-même. « Chaque âme, disait Amiel, a son climat. » Celui de poète Hoelderlin(sic), c'est la Méditerranée et ses îles ensoleillées que pourtant il n'a pas connues. Chateaubriand aime la mer, mais la montagne, dont la démesure l'écrase, lui « semble le séjour de la désolation et de la douleur ». (...)

Toute la conclusion est consacrée à la remise en cause de la science que connaît son époque. Il évoque « les doctrines contemporaines du désespoir et de l'absurde », qui « ne sont pas sans rapport avec le désenchantement de notre univers, banalisé par un savoir qui nivelle les reliefs, écrase les différences, éteint les couleurs ». Et voit au contraire « une nouvelle fraîcheur de vision » dans les tendances de l'art contemporain à « faire appel à la sensation pure, capter et transmettre son émerveillement devant la vie, sans s'inquiéter du sens, de la liaison logique avec le sens commun. » On comprend de quoi il parle si on connaît les peintres français de l'immédiat après-guerre, les « expressionnistes lyriques » exposés l'an dernier au musée du Luxembourg, Manessier, Bazaine...

Et continue en démontrant avec brio, par une sorte de réduction conceptuelle des eaux marines, que seule une vision simpliste croit que la seule science suffit pour atteindre la réalité dans toutes ses dimensions (p.132) :

À quel niveau de réalité les eaux marines sont-elles vraiment « réelles » ? Est-ce à leur niveau de phénomène, là où leurs transparences, leurs reflets, leurs ondulations agissent sur nos sens et notre imagination ? Ou bien au niveau du schéma qu'en tire l'analyse physico-chimique ? Est-ce à l'onde que nous « voyons » ou à la molécule, à l'atome que nous « concevons », que nous devons accorder la valeur essentielle ? La science ne vise pas la réalité des choses, mais leur « possibilité », non leur particularité « historique », mais leur connexion « légale », non leur « nature », mais leur composition. La géographie, par sa position, ne peut manquer d'être tiraillée entre la connaissance et l'existence. En s'écartant de la science, elle se perdrait dans la confusion et le bavardage. En se livrant sans réserves à la science, elle s'exposerait à ce que Jaspers appelle « une nouvelle vision mythique », oubliant que l'attitude scientifique objective entre dans une compréhension totale du monde qui ne peut manquer d'être aussi morale, esthétique, spirituelle. Le froid détachement cosmique du spectateur s'accorde mal avec la finitude et la déréliction de l'homme en son existence effective, avec l'exigence concrète de son séjour terrestre.

C'est moi qui surligne ; ce n'est pas une approbation mais une marque d'intérêt. Cet article n'est peut-être pas terminé. Ceci est la version 3, du 8 mai à 21h et un peu plus.

Publié par thbz (mai 06, 2007) | Commentaires (7)


mai 03, 2007

03 mai 2007 - Italie - (lien permanent)

Morts à Milan

Dans aucun cimetière au monde je n'ai vu autant de sculptures qu'à Milan.

Le sculpteur :

L'homme en pleine action :

Le prédicateur :

Le corps du Christ :

Art moderne :

Lucio Fontana :

Accumulation :

Publié par thbz (mai 03, 2007) | Commentaires (6)


03 mai 2007 - Italie - (lien permanent)

Milan, 1er mai

Dans aucune ville au monde je n'ai vu autant de sculptures qu'à Milan.

J'ai déjà parlé d'un autre squelette, vu à Paris celui-là. Il ne mesurait que 17 mètres de longueur, mais il flottait dans les airs.

Publié par thbz (mai 03, 2007) | Commentaires (8)


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