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novembre 14, 2014
14 novembre 2014 - Corée - (lien permanent)
Destruction
Aujourd'hui j'ai traversé un quartier de Séoul en temps de paix :
Les drapeaux rouges signifient l'opposition des derniers résidents. Ici un habitant résiste encore au dernier étage d'un bâtiment dominant la montagne de gravats (même site il y a deux ans). Des jarres à kimchi abandonnées sur une terrasse. « En cours de construction, désolé ! Merci de faire un détour. » « Un procès est en cours, etc. » (banderole déjà en place il y a deux ans) Parti sans laisser d'adresse ? À Séoul, on construit sur les ruines de la ville ancienne.Les bâtiments qui tiennent encore debout démontrent que le quartier n'était ni insalubre, ni dangereux. C'était juste un quartier comme Séoul en compte tant, construit vers la fin du vingtième siècle, avec des rues pas vraiment droites, des escaliers pour escalader la colline, des maisons de trois ou quatre étages en brique ou en béton, certainement des commerces, peut-être même un marché.
Dans quelques jours, quelques semaines sans doute, tous les habitants restants auront été expulsés, les bâtiments détruits, les gravats enlevés. Et dans deux ans, le site ressemblera à ce grand ensemble tout neuf que j'avais traversé un peu plus tôt dans l'après-midi :
La nature, paraît-il, a besoin de biodiversité pour survivre : le mélange des espèces favoriserait la survie de toutes, chacune interagissant avec les autres. Les jardiniers, aujourd'hui, multiplient les espèces plutôt que d'essayer d'en imposer une seule qui serait la meilleure de toutes. N'en est-il donc pas de même de la ville ? Une forme unique d'habitat peut-elle recouvrir peu à peu une métropole de vingt millions d'habitats sans qu'il manque quelque chose à la ville ?
Publié par thbz at novembre 14, 2014 | Commentaires (3)
novembre 07, 2014
07 novembre 2014 - Corée - (lien permanent)
Bach et Haendel, père et mère de la musique
Ainsi commence l'article coréen de Wikipédia consacré à Haendel, à côté d'une reproduction de peinture montrant un homme portant perruque. J'ai souligné la dernière phrase.
Sur l'article consacré à Bach, il faut descendre jusqu'à la section « Famille de Bach » pour y lire que Bach est considéré comme le père de la musique occidentale.
Haendel et Bach, respectivement mère et père de la musique (occidentale) ? Cette idée constitue en fait un lieu commun en Corée, où elle est enseignée à l'école.
On peut certes demander aux Coréens d'où vient cette dénomination, mais beaucoup l'ignorent et certains se posent la question fondamentale : « Puisqu'on dit que Haendel est la mère de la musique — et d'ailleurs il porte une perruque sur son portrait — s'agissait-il d'une femme ? »
Il faut donc chercher un peu plus pour comprendre l'explication de ces surnoms.
Peu d'espoir de trouver une réponse sur des sites occidentaux : Bach et Haendel ne sont père et mère qu'au Japon et en Corée.
Heureusement, la question est régulièrement posée sur les sites coréens : pourquoi Bach est-il le père et Haendel la mère de la musique ? Un internaute répond par une analyse du style des deux musiciens qui présente une vision assez essentialiste des rôles du père et de la mère :
- Bach a écrit une musique tournée vers ce qu'il y a de plus haut. Haendel a cherché à satisfaire les goûts d'un large public ;
- Bach a utilisé les formes les plus complexes pour composer de la musique religieuse sérieuse ;
- parce que sa musique produit la même impression qu'un père, Bach est appelé le père de la musique ;
- Haendel, quant à lui, est brillant et libre d'esprit ; son œuvre est en majorité profane ;
- parce que sa musique a la tendresse et la familiarité d'une mère, on lui donne le nom de mère de la musique.
Sur d'autres sites coréens, on trouvera des explications du même ordre. Par exemple :
- la musique de Bach se fonde sur la réflexion et la logique, celle de Haendel est plus dramatique et claire [*] ;
- par rapport à la musique de Bach qui est pieuse et sérieuse, celle de Haendel est brillante et exquise, ce qui est un trait de la personnalité féminine [*].
Au final, cette formule ne nous apprend peut-être pas grand chose sur l'histoire de la musique, mais elle est révélatrice d'une certaine conception du rôle de chacun au sein de la famille.
Mise à jour en janvier 2020 : la mention de Haendel comme « mère de la musique » a été supprimée le 20 mars 2017 de l'article de Wikipédia en coréen, avec le commentaire suivant: « L'histoire selon laquelle Haendel est la mère de la musique est un vestige de l'impérialisme japonais ».
Publié par thbz at novembre 07, 2014 | Commentaires (2)