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mai 08, 2020

08 mai 2020 - 13e arrondissement - (lien permanent)

Confinement, jour 53 : Paris qui dort

Le film du jour, c'est Paris qui dort, de René Clair, opportunément mis à disposition par la Cinémathèque française sur son système PeerTube qui fonctionne parfois, et parfois pas.

C'est une histoire où Paris se retrouve, du jour au lendemain, vidé de tout mouvement et de toute activité.

Le film commence au sommet de la tour Eiffel, parce que le rayon qui a paralysé tous les Parisiens n'est pas monté jusqu'à son troisième étage, épargnant son gardien.

L'homme descend alors de la tour, suivi par une caméra qui filme la tour plus que lui, dans une admirable symphonie visuelle de fer puddlé. René Clair forme une vision qui lui fera réaliser trois ans plus tard un film entièrement consacré à la tour.

La promenade dans les rues désertes est celle que nous avons tous faite en traversant à l'occasion Paris depuis le 16 mars. Mais nous avions tout le temps de regarder les rues vides, alors qu'on sent que René Clair n'a pu prendre que quelques images fugitives d'un Paris inanimé.

Le gardien de la tour Eiffel court vers un homme prêt à se jeter dans la Seine. Mais rien ne presse : le désespéré est paralysé au milieu de son geste, comme les amants de Pompéi.

Il en est de même d'un gendarme qui poursuit un voleur.

Le gardien de la tour Eiffel se souvient alors que la ville normale est celle du mouvement et du bruit, des sensations qui s'entre-choquent, du choc des métropoles. L'idée du film doit être précisément dans la rupture avec le sentiment, courant au cours des années 20, de la vie surabondante des grandes villes, de la symphonie de Berlin selon Walther Ruttmann, qui devient une « harmonie » dans lla version parisienne moins connue de Lucie Derain, que propose aussi la Cinémathèque.

Comme il faut bien qu'un film ait une histoire, et que l'histoire, depuis Eschyle, commence avec l'arrivée du second personnage, le gardien de la tour Eiffel rencontre d'autres personnes qui ont échappé au rayon paralysant du savant fou.

Ils profitent quelque temps de la liberté absolue de jouir que leur donne l'absence de tout contrôle, buvant du champagne, volant des bijoux et emmenant même la Joconde à l'arrière d'une automobile, mais ils reviennent à la tour Eiffel parce que c'est elle, et Paris d'en haut, que veut filmer René Clair, et je ne suis pas sûr qu'elle l'ait jamais été aussi bien dans toute l'histoire du cinéma. Le film y reviendra donc régulièrement...

... et cela jusqu'au plan final.


Publié par thbz at mai 08, 2020 | Commentaires (0)


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