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août 31, 2005

31 août 2005 - Paris - (lien permanent)

Incendie à Paris

J'étais à Beaubourg, au cinquième étage, lorsque j'ai vu une brume étrange au-dessus de Paris. Je suis sorti sur le balcon. La colonne de fumée, épaisse, parfois violente, sortait d'un immeuble proche de la rue de Rivoli, enveloppait Saint-Merry et recouvrait tout le centre de Paris jusqu'à Montmartre.

En bas, sous le vent cela sentait le roussi et les gens, c'est à dire nous tous, regardions le spectacle comme dans les films-catastrophes tandis que les pompiers arrivaient et que les policiers établissaient les cordons de sécurité. La fumée charriait parfois des étincelles.

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31 août 2005 - Arts, architecture... - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Églises romanes d'Auvergne (II)

Paris-Millau
< Églises romanes d'Auvergne (I) - Églises romanes d'Auvergne (II)


Chacune des cinq églises majeures a sa beauté propre.

L'abbatiale d'Orcival est une église monumentale perdue dans un tout petit village. L'église de Saint-Nectaire domine son village sur un piton rocheux ; pendant longtemps on continue à l'apercevoir lorsqu'on s'éloigne peu à peu sur les lacets des collines environnantes. Surtout quand on voyage à vélo.



Saint-Saturnin, c'est la plus petite des églises majeures. Blottie au milieu d'un village impeccable, resplendissante au petit matin, elle a conservé sa flèche sous la Révolution parce que la femme du destructeur d'églises local était née dans le village. Dans l'intimité d'une chapelle de campagne, Saint-Saturnin réunit tous les éléments des plus grandes églises romanes d'Auvergne, au service d'une intensité spirituelle inégalée.

A Notre-Dame-du-Port, l'extérieur était en travaux, comme d'ailleurs toute la ville de Clermont-Ferrand cette année. Restaient les chapiteaux. Ce petit corps emmailloté n'est pas un bébé dans les bras de son père ; c'est au contraire Marie, emportée hors du tombeau par Dieu et prête à ressusciter.

Enfin l'intérieur de l'abbatiale Saint-Austremoine, à Issoire, a été entièrement repeint de couleurs vives afin de retrouver l'atmosphère du Moyen Âge. Lorsque j'y suis entré, le prêtre célébrait un mariage au son des negro spirituals. Une heure plus tard, un autre couple avait moins d'imagination : premier prélude de Bach avec boîte à rythmes.

Issoire, comme les autres, doit être vue au petit matin :


Paris-Millau
< Églises romanes d'Auvergne (I) - Églises romanes d'Auvergne (II)

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août 24, 2005

24 août 2005 - Arts, architecture... - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Églises romanes d'Auvergne (I)

Paris-Millau
< Vichy - Églises romanes d'Auvergne (I) - Églises romanes d'Auvergne (II) >


Il y a certaines choses, en Auvergne, à côté desquelles on ne peut pas passer sans s'arrêter.

Parfois certains arts parviennent, dans un style donné, à un état de réussite totale et impossible à dépasser. De ce sommet, quelle que soit la direction que l'on prenne, on ne peut que redescendre. Vers l'an 1100 les moines de la Chaise-Dieu ont, comme des alchimistes, trouvé la formule idéale de l'église romane d'Auvergne. Beauté de la pierre d'arkose, équilibre des formes du chevet, solidité de la structure, intensité spirituelle de l'atmosphère intérieure : ils savaient réunir dans un seul édifice tout ce que l'on peut demander à une église. Il ne leur restait plus, comme pour un pianiste qui maîtrise son répertoire, qu'à mettre en œuvre ce répertoire architectural à travers l'Auvergne. On désigne aujourd'hui sous le nom d'« églises majeures » cinq églises du Puy-de-Dôme qui illustrent merveilleusement la perfection classique que l'architecture romane, à ce moment-là, atteignit en Auvergne.

Ce qui surprend, dans les églises romanes d'Auvergne, c'est qu'elles n'ont pas de visage : leur façade occidentale est mal dégrossie, à peine décorée (Notre-Dame du Port), lorsque l'église n'est pas tout simplement adossée à la montagne du côté occidental (Orcival). En revanche elles ont un corps : un chevet bien planté, comme le postérieur d'un sphinx, qui monte par étage et s'affine jusqu'à la flèche.

La beauté de ces églises se renouvelle au fur et à mesure qu'on approche d'elles. L'équilibre des proportions se renouvelle à toutes les échelles.

De loin, l'église se dresse au-dessus d'un village et s'inscrit dans la nature comme si les montagnes avaient été construites autour d'elle :


Saint-Nectaire




Lorsqu'on arrive au village, les chapelles rayonnantes se détachent du chevet et le clocher se dresse au-dessus du bien-nommé « massif barlong » :
Orcival
Enfin apparaît le décor, composé de motifs abstraits et répétitifs, agglutinés comme les chapelles autour du chevet, uniformes et élégants comme les églises à travers l'Auvergne.
Issoire

Aucune échelle n'écrase l'autre : le décor reste confiné au détail, les chapelles ne débordent pas assez du bâtiment pour compromettre l'équilibre de la composition.

La beauté des formes est magnifiée par les matériaux employés, en particulier l'arkose, pierre qui se dore au soleil du matin comme celle de Paris au crépuscule. Pierre rare, malheureusement : lorsque viendra le temps des cathédrales, les bâtisseurs passeront à la pierre de lave, pierre très solide qui résistera aux révolutionnaires mais donnera à Clermont-Ferrand un aspect noirâtre qui fait penser aux monuments parisiens dans les années 70.






A l'intérieur, les structures comme le décor obéissent à une symbolique complexe. La croisée du transept est soutenue par quatre piliers, formant un carré qui symbolise la Terre. Il est surmonté d'un dôme, c'est à dire du ciel. Et au-dessus du dôme, visible de l'extérieur, c'est la tour octogonale représentant le Paradis.

Saint-Saturnin

Sur les chapiteaux eux-mêmes, l'espace exigu interdit tout réalisme. Chaque figure, chaque geste a une signification au-delà de ce qu'il représente. Deux bras et un visage suffisent pour décrire une situation et les vêtements indiquent les fonctions, un bras sur lequel s'appuie le visage exprime la perplexité.


Saint-Nectaire

La suite sur Églises romanes d'Auvergne (II).


Paris-Millau
< Vichy - Églises romanes d'Auvergne (I) - Églises romanes d'Auvergne (II) >

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août 19, 2005

19 août 2005 - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Vichy

Paris-Millau
< Nevers - Vichy - Églises romanes d'Auvergne (I) >


Vichy est une ville assez importante pour que l'État français ne soit qu'une période de son histoire. Et assez vivante, grâce au thermalisme, pour que le touriste voit d'abord, dans le Palais des Congrès, un lieu de spectacle ou un exemple de l'architecture éclectique du 19ème siècle plutôt que l'endroit où le Parlement français vota un jour les pleins pouvoirs à Pétain. Et au-delà du thermalisme, Vichy est une ville agréable et animée.

Ville d'eaux, Vichy l'est au sens propre. Le Palais des sources, en plein centre-ville, permet à chacun de boire les principales eaux de Vichy. C'est un plaisir inattendu de goûter l'une après l'autre ces eaux chaudes, parfois presque brûlantes comme la source Chomel, ou fraîches et gazeuses comme Vichy Célestins : jamais cette eau à forte teneur en sodium n'est « inodore et sans saveur ».

Vichy, comme Deauville ou Biarritz, est devenue populaire grâce à Napoléon III. Ici encore plus qu'à Deauville ou à Biarritz, les architectes s'en sont donné à coeur joie. Ce n'est que dans les stations balnéaires et les villes thermales qu'on peut, en France, s'affranchir un peu du carcan imposé par le bon goût et s'amuser à construire un peu ce que l'on veut.



Ainsi, Vichy reprend la plupart des styles architecturaux et les juxtapose. Ici, un peu de médiéval collé à de l'Art Déco (une fantaisie inimaginable à Paris) :

Dans une rue proche, deux tours médiévales pour encadrer la maison natale d'Albert Londres :

À l'arrière du Palais des Congrès, une façade sur laquelle l'habillage passe brusquement de la pierre à la brique alors que la forme des fenêtres et l'organisation de la façade ne changent pas.

Ailleurs, un exemple d'ordonnancement haussmanien :

On pourrait multiplier les exemples. Il suffit de marcher au hasard dans les rues. Ainsi la rotonde à coupole mauresque du Monoprix ou, ici, une curieuse maison tunisienne.

L'architecture moderne ne se limite pas au béton et aux jardinières de la médiathèque. Sur la place de l'hôtel de ville, un immeuble d'habitation ondulé est plus intéressant :


Paris-Millau
< Nevers - Vichy - Églises romanes d'Auvergne (I) >
Galerie de photos.

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19 août 2005 - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Nevers

Paris-Millau
< Gien - Nevers - Vichy>


À Nevers, le centre de gravité de la ville n'est pas la Loire comme à Gien, mais la colline sur laquelle se dressent la Cathédrale et le Palais ducal. C'est dimanche. La ville est quasiment déserte, à l'exception de quelques bars en contrebas. L'Office du tourisme, toutefois, présente une exposition intéressante sur les faïences "patronymiques", c'est à dire qui portent le nom d'une personne. Au XVIIIème siècle, cela se fait beaucoup. Un notable, un artisan ou un cultivateur commande une assiette personnalisée. Il est représenté sur l'assiette en plein dans son activité. Son nom est inscrit en-dessous. Parfois son saint patron veille sur lui.

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La faïence de Nevers est beaucoup plus vénérable que celle de Gien. Elle occupe beaucoup plus de place dans les grands musées, mais beaucoup moins dans les boutiques. On trouve au Louvre certains de ces plats du XVIème siècle, multicolores, inspirés de la majolique italienne : les premiers faïenciers appelés par le duc de Nevers sont italiens. De l'autre côté de la rue de Rivoli, en revanche, au Louvre des Antiquaires, on trouve plutôt des faïences de Nevers du XVIIIème : plus populaires, plus simples. En particulier des faïences révolutionnaires qui exaltent les valeurs du moment ; les faïenciers sont des artisans, ils savent s'adapter au marché.

L'autre curiosité de Nevers, c'est la cathédrale. Impossible d'en avoir une vue extérieure d'ensemble car, contrairement au Palais ducal, elle n'est pas mise en valeur par une vaste esplanade. Cette cathédrale possède deux chevets et pas de façade. C'est que l'édifice gothique a réutilisé une église romane antérieure, qui avait la particularité d'être orientée à l'envers : avec le chevet à l'ouest.

À l'intérieur, les vitraux forment une sorte de musée du vitrail contemporain. De nombreux artistes y ont contribué : Jean-Michel Alberola, Claude Viallat, Raoul Ubac... Tous les visiteurs n'apprécient pas. Des graffitis sur la notice de présentation des vitraux demandent s'il s'agit vraiment d'art. Pourtant, leurs motifs simples et austères, qui diffusent une lumière belle et variée, s'accordent mieux avec l'atmosphère du lieu que beaucoup de statues médiocres dans d'autres églises.


Paris-Millau
< Gien - Nevers - Vichy>
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19 août 2005 - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Gien

Paris-Millau
Gien - Nevers >


Gien (le lien pointe vers Wikipédia, que je fais profiter un peu de mes voyages), première étape atteinte après 150 km de route, s'étire indéfiniment le long de la Loire. Dominée par un château du XVème siècle. Fameuse pour sa faïence.

La boutique de la faïencerie occupe un vaste hangar dans lequel on fait ses courses avec un caddie. Tout s'y mélange, du kitsch au bon goût. Des assiettes carrées ornées de fleurs schématiques et volontairement mal cadrées, que l'on verrait bien dans les boutiques tendance du Marais. Des imitations de Grands Anciens comme on en trouve chez les antiquaires. Et puis des modèles plus banals de fruits et d'animaux : là, on est plutôt chez Monoprix. Il vaut mieux visiter cette boutique que le musée qui se trouve à côté, trop petit et peu intéressant.

Lorsque la faïence s'est installée à Gien, vers 1820, la porcelaine avait envahi depuis longtemps les cours royales d'Europe. Il fallait donc se tourner vers une céramique plutôt populaire, ce que Gien a su faire très bien alors que tant d'autres villes de faïence déclinaient à la même époque.

Pour la décoration, Gien a choisi la voie de la copie. Les modèles sur fond bleu s'inspirent des grotesques italiens de la Renaissance, les lambrequins et cornes d'abondance viennent de Rouen. D'autres pièces produites en série reprennent des fleurs chinoises ou des carrelages turcs. Plus tard Gien a aussi réalisé des modèles originaux et quelques vases aux dimensions cyclopéennes pour des expositions universelles. Passeport nécessaire pour se faire connaître : le métro parisien a alors fait appel à Gien pour couvrir ses murs de faïence. En un mot, Gien c'est de la faïence « populaire mais de qualité ». Très différente de celle de Nevers, où j'irai le lendemain.

Gien est donc une petite ville assez animée le samedi. Quelques touristes visitent le château et le musée de la Chasse. Flânent dans la rue piétonne. Regardent les vitrines pleines de faïence. Il y a même un petit cyber-café, un espace Internet à l'Office du Tourisme et un traiteur chinois.

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Le fleuve, toutefois, absorbe toute cette animation. Ses dimensions maintiennent les maisons à distance. Son calme l'isole de la ville. Quelques bateaux sont ancrés au hasard, apparemment inutiles. La plupart des villes utilisent tout l'espace disponible pour concentrer leurs activités. Elles bétonnent les rives pour empiéter sur le domaine naturel. Ici, au contraire, l'homme a laissé des berges immenses à la disposition du seul fleuve.

Théorème : pendant l'été, les soirs de week-end, toutes les villes de province organisent des concerts en plein-air assourdissants. J'ai vérifié ce théorème à Sens, à Châlons-en-Champagne, à Verdun et à Gien. Exception quelques jours plus tard à Issoire où le concert, consacré à la musique ancienne, n'utilisait pas une sono disproportionnée.


Paris-Millau
Gien - Nevers >
Galerie de photos.

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19 août 2005 - France - Paris-Millau 2005 - (lien permanent)

Paris-Millau

Je voulais voir le viaduc de Millau, mais personne ne ferait huit heures de train juste pour voir un édifice. Il fallait, pour justifier mon voyage, que l'objectif ne soit pas seulement la destination, mais aussi le trajet lui-même. Comment donc aller jusqu'à Millau ?

Le train permet de se déplacer d'une ville à une autre ; il ne permet pas de découvrir la campagne qui les sépare. En voiture, le conducteur ne peut pas vraiment profiter des régions traversées. L'avion demande une longue préparation : pas question d'improviser un voyage et de rester un jour de plus, ou de moins, que prévu. À pied, c'est amusant un moment, mais un peu répétitif ; et la brièveté des étapes aurait obligé à faire du camping. Il restait un moyen de transport : le vélo.

Certes, Paris-Millau, cela représentait des centaines de kilomètres, la traversée du Massif Central du nord au sud. Quelques vrais cols de montagne, des côtes sans nombre. Chaque jour, de nombreuses heures de route. Et lorsqu'on arrive à l'endroit où on compte faire étape, il faut encore trouver un hôtel ; décrocher les sacoches et les vider ; prendre une douche ; et seulement après, chercher un endroit où manger un bout ; or l'après-midi est déjà largement entamé et on ne trouve plus que des sandwiches. Bref, la route qui mène au viaduc de Millau est longue et semée d'embûches.

La route elle-même n'est pas une simple promenade. Lorsqu'on doit parcourir 100 ou 150 kilomètres dans la journée, il n'est pas question de s'arrêter à chaque coin de champ. Certes on ralentit parfois devant un champ de tournesol, on s'arrête même pour prendre une photo si le spectacle en vaut la peine (mais on est toujours déçu par la photo, elle ne reproduit pas le vent qui vous rend plus attentif, elle ne vous enveloppe pas de tous les côtés comme un site de montagne). On veut arriver à l'étape assez tôt pour pouvoir visiter un musée ou une église.

Le Parisien découvre ainsi que la campagne, ce n'est pas seulement un lieu sans cinéma, sans magasins et sans métro. C'est aussi des paysages qui se renouvellent juste au rythme qu'il faut : la campagne défile assez lentement pour qu'on ait le temps de la contempler et assez rapidement pour qu'on ne s'en lasse pas. Car on ne pourrait pas y vivre, bien entendu ; on la traverse en touriste. L'effort physique prend le pas sur les pensées et empêche le cerveau de s'ennuyer. On peut passer huit heures consécutives sur un vélo sans jamais avoir l'impression de perdre son temps.

Chaque ville-étape, sur ce parcours, avait son intérêt. Plus elle était petite, comme Saint-Flour ou Mende, plus la taille ou la beauté de son église surprenait par rapport à la faible importance de la ville. Je me sentais naïf comme ce Parisien qui, sur le livre d'or d'une exposition d'art contemporain à Issoire, avait noté sa surprise devant la qualité de la vie culturelle dans une ville aussi petite.

Les étapes : Gien, Nevers, Vichy, quelques jours autour de Clermont-Ferrand, du Puy-de-Dôme et des églises romanes, Issoire, Saint-Flour, Mende et Millau, sont ou devraient être bientôt décrites dans des notes.

Trois galeries de photos :
- de Paris à Vichy,
- dans le Massif Central,
- Millau et le viaduc.

Publié par thbz (août 19, 2005) | Commentaires (2)


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